Toujours en quête de bleu
Les mots ne sont pas encore tout à fait revenus et mon envie d’écrire non plus. Ce sera donc une note comme ça. A regarder longtemps la mer j’ai trouvé une certaine sérénité, et une envie de respirer lentement, profondément, jusqu’aux cellules les plus lointaines de mes poumons et de mon âme.
Pourtant ces vacances n’ont pas débuté sous les meilleurs auspices : privée de mer Egée et d’une famille bruissante et rieuse autour de moi, j’ai eu du mal à accepter les vignes de ce village de l’Hérault où nous avons retrouvé des amis. J’ai exécré cette campagne où l’on trouvait des carcasses de voiture à presque chaque coin de vigne sans parler des bouteilles en plastique jetées ça et là. Le thym était tout desséché et n’embaumait pas. Le soleil était distant, si ce n’est absent, la mer froide, les villes balnéaires hideuses à crever. Je suis pourtant habituée aux villes champignons monstrueuses s’étendant le long des routes touristiques et bordées d’immeubles jamais achevés et de chantiers poussiéreux. Et de plus je savais que Palavas c’était moche et Agde aussi. Mais j’espérais une lumière qui viendrait sublimer tout ça.
Peine perdue. Le soleil m’a boudée, me renvoyant aux rives lointaines de mon pays de cocagne. Bon il y avait un avantage: les plages étaient plutôt vides par rapport à ce qu’elles doivent être en temps chaud.
Et puis j’exagère, j’ai adoré la ville toute brouillonne et industrieuse qu’est Sète, même si on s’y fait virer des restaurants à 22h30…
Un peu déçus, (j'exagère encore, et mon album photo le prouve...)
nous avons encore bougé. Cap encore plus au sud : Collioure, puis Banyouls. Et là ce fut magique. Nous avons découvert la Côte Vermeille. Plus de sable fin, tant pis, mais des falaises se déversant sur des petites plages caillouteuses. Et le soleil a souri lui aussi. J’ai enfin pu nager des heures durant.
Comme il ne faisait décidément pas beau, nous nous sommes dit que c’était le bon moment pour aller voguer sur les eaux du Tarn. Effectivement il n’y avait pas grand monde et le paysage était grandiose. L’eau froide, certes. Mais si notre coordination familiale avait été plus grande nous ne serions pas tombés à l’eau… Parce que si l’un rame à gauche et l’autre à droite, forcément on se prend le rocher du milieu de la rivière… Grande leçon que nous n’avons pas fini de méditer !
Mon mari a adoré ces vacances en France. Rien à dire, c'est vraiment un beau pays. Nous avons apprécié aussi de nous retrouver en famille restreinte, ce qui nous arrive rarement en fait. Il s’y est senti plus libre aussi je crois, sans le poids de sa famille, peut-être aussi grâce à la légèreté de la toile de tente... Moi je veux bien passer les prochaines vacances de Pâques de nouveau au bord du Tarn ou de l’Hérault.
Mais pour ce qui est du reste, je préfère quand même la mer Egée pour l’été, au moins y suis-je assurée de trouver la chaleur que j’aime tant ! Et puis j’aime entendre mes tantes et cousins cousines autour de moi. De toutes façons, je leur suis trop étrangère pour qu’ils puissent entrer dans mon recueillement estival, alors je n’entends que les rires. Cependant je me rends compte que nous avons eu du nez cette année: si nous étions allés en Turquie, nous serions probablement restés des heures et des jours coincés dans un aéroport à attendre vainement un avion... A bien y réfléchir je crois aussi que c'est le décentrement de moi-même que j'apprécie dans le fait d'aller en Turquie. Pour moi cela reste un peu exotique, pas totalement. Ce dépaysement, décalage avec moi-même permet de créer des interstices entre mes visions du monde qui me paraissent enrichissants. Bizarrement en France, je ne parviens pas à me décaler de moi-même. Ce qui me prouve que je suis devenue irrémédiablement française ! Mais je crois que je n'ai probablement pas fini d'essayer de comprendre pourquoi je suis bouleversée au point d'en pleurer devant un olivier rabougri ou les pierres calcinées de la côté égéenne et que je trouve la France seulement belle... Ingrate que je suis ! Pourtant je suis sûre que cela n'a rien avoir avec l'idée de patrie. Ca vraiment je m'en fiche un peu. Est-ce délirant de penser que c'est une question de lumière ?
Retour à Paris avec une folle envie de remettre la tête sous l'eau et la série d'attentats en Turquie ne fait qu'ajouter à ma déprime de pré-rentrée et à mon impression que je suis devenue incapable de faire cours.