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Iles où l'on ne prendra jamais terre
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22 mars 2009

Faire les courses sans porc

Ca va, ça va. Maintenant mieux. Plus de courses au Kâfour le samedi avec Deniz. Alors ça va. Les courses ensemble, c’est la dispute. Deniz s’énerve, Ada pleure et on se reparle pas  avant dimanche. Quand je lis les étiquettes des paquets de biscuits, il crie. Comme si t’y comprends quelque chose, il dit avec le caddie. Il m’abandonne en plein milieu du rayon gâteau ou pâtes. Après il faut les retrouver, obligé de courir jusqu’aux œufs ou même aux lessives. Et ça l’énerve beaucoup. Une fois, j’ai retrouvé le caddie abandonné en plein milieu des fromages. Ada pleurait dedans. Deniz était allé fumer à la cafétéria pour se calmer. Et je pouvais même pas expliquer. Lui dire pourquoi je lis les étiquettes ? Pas possible ! Il explose de rage. Mais moi je fais comment après pour servir les biscuits à Emine ou Hayriye ? Elles viennent l’après-midi à la maison pour boire le thé.  Ces sorcières elles comprennent rien mais pour retrouver écrit «graisse d’origine animale » dans les ingrédients elles sont championnes. Elles n’ont que ça à faire ma parole. C’est cet imbécile d’imam, il leur a appris. Lui aussi il n’a que ça à faire.  N’achetez pas de viande dans les supermarchés, il dit, ce n’est pas halal, vous commettriez des péchés, ne consommez pas les produits des gavur, ils mettent du gras de cochon partout, exprès pour l’enfer. Une fois elles ont demandé le paquet de biscuits au chocolat que j’avais vidé pour elles sur ma belle assiette à service. Obligée je retourne le chercher dans la poubelle. Elles ont fouillé de leurs yeux sournois qui ne savent même pas lire le turc tous les mots étrangers des ingrédients. Voilà, voilà, tu vois ! Elles ont crié. Elles ont trouvé les mots maudits sur le paquet. Nous n’en mangeons pas, elles ont dit en se tordant le nez … la honte de ma vie, pire qu’un adultère ma parole. Obligée j’ai fait un gâteau au yaourt sous leurs yeux. Comme des truies elles ont mangé. Elles ont mis du  bon gras végétal avec leurs gros doigts sur les verres à thé. Inshallah cela suffit à leur fermer leur sale bec !  

Expliquer ça à Deniz, comment ? Pas possible ! D’abord il injurie les voisines, ensuite il crie sur moi, vire-les à coups de pied au cul ces arriérées, il dit. Facile… Et les autres Turcs ils disent quoi ? Ils nous montrent du doigt  ma fille et moi comme quoi on mange du cochon ? 

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Commentaires
A
Fauvette: j'ai une sacrée maman hein ? <br /> <br /> Andrem: Ah oui c'est vrai, ton premier commentaire était vraiment adressé à ma narratrice de maman: je (Ada, la tenancière du blog) ne suis plus du tout vexée du tout. Par contre ton commentaire et ma réaction me font réfléchir: pourquoi étais-je vexée d'avoir été prise pour maman alors que justement j'aurais du (moi scrivaillonne) être flattée ? <br /> Ce sont les limites du blog au fond. Enfin de ce blog-ci que j'ai commencé de manière assez personnelle, avec mon "je" réel. Je confesse aussi une profonde fascination à l'égard des quelques rares personnes que je connais et qui parviennent à tenir un blog avec un "je" virtuel digne des narrateurs les plus travaillés de la littérature. <br /> Je te remercie Andrem de ton passage et de ton commentaire qui me font me poser des questions importantes. <br /> <br /> Ca me dépasse tout ça ! <br /> En plus, je n'ai même pas tenu ma promesse de parler des Climats: aujourd'hui il fait gris mais le temps est doux !
A
L'écrivain doit toujours décider qui sera le narrateur. Il penche, il hésite, lui faudra-t-il un truchement, un prétexte, un masque, ou se montrera-t-il en plein jour.<br /> <br /> Lorsqu'il écrit je, l'écrivain, il joue. Il nous présente un narrateur qui peut être lui ou ne pas l'être. Un étranger inventé, un modèle pris lors d'une rencontre, un proche, et pourquoi pas sa mère. L'écrivain fait ce qu'il veut, ou ce qu'il peut, avec sa liberté ou ses peurs, et il mets un masque ou se démasque sous un autre masque plus invisible encore que celui dont on avait bien lu qu'il était masque. Il gardera secrets ses secrets.<br /> <br /> En échange de cette liberté et de ces peurs là, le lecteur a la liberté de lire ce qu'il lit. Et si le je de l'écrivain lui échappe, qu'importe du moment qu'il ressemble au jeu du lecteur. Il en est qui sauront à quel jeu jouer, à quel je se vouer, parce qu'ils auront les clés des portes du labyrinthe. Il en est d'autres qui construiront leur labyrinthe à eux, où même l'écrivain se perdrait s'il y venait sans reconnaître son enfant.<br /> <br /> A chacun son trousseau, sa boussole, et ses portes. Mais une seule chose est certaine que nul ne contestera, et dont je n'ai jamais laissé entendre le contraire nulle part, c'est que l'écrivain que je viens lire régulièrement par tous temps est un écrivain qui me plait.
F
Moi j'aime bien, j'ai tout de suite pensé à ta maman !
A
Anita, je te remercie pour ton télégramme et ton encouragement. Ca me va droit au coeur. Ne t'inquiète pas, je taquine Andrem. Si j'ai publié ce texte, c'est que j'ai renoncé à exploiter cette idée de retrouver le français de ma mère. C'est finalement très artificiel comme exercice !
A
Suis pas d'accord-stop-c'est écriture-stop-pour de vrai-stop.<br /> Bien meilleure que le porc, d'ailleurs, au fond.
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