Glissement de sens
Anatole ne travaille plus ce trimestre. C'est à peine s'il parvient à ouvrir un cahier au bout d'une heure de cours, snobe royalement tous ses professeurs alors que c'était le plus agréable et travailleur des élèves. C'est arrivé comme ça, du jour au lendemain. Personne ne comprend ce qui s'est passé, et surtout pas son père. Lui même est muet comme la tombe quand on lui parle. Comme il est loin d'être un dilettante brillant, il ne peut vraiment pas se permettre ce comportement.
Hier, cependant, il a consenti à me dire qu'il en avait assez que les autres le traitent de "blédard".
J'écarquille les yeux. Je ne comprends pas. Anatole et sa famille sont plus parisiens que la cathédrale Notre Dame. Pas de village provincial dans un passé proche en tous cas. Rien non plus venant de l'autre côté de la Méditerranée. Alors ?
Le mot a connu un sacré glissement de sens on dirait, il n'a plus rien à voir avec le fait d'être originaire du "bled".
Dans la bouche de mes charmants 4ème, il stigmatise juste le fait que l'élève fait des efforts.... un peu comme "trimard" en fait, si on considère que la notion de "route" comme de "travail" fait partie du destin du blédard.