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Iles où l'on ne prendra jamais terre
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16 juin 2006

A la recherche de ma matrie

r11Longtemps j’ai considéré que le turc n’était plus ma langue maternelle. J’avais l’impression de ne pas suffisamment le maîtriser, je disais que je rêvais en français. A y regarder de plus près aujourd’hui j’ai l’impression que je cherchais plutôt une « matrie » (c'est ainsi qu'on dit patrie en turc). Je ne voulais pas aimer ma mère. Pour moi elle était une femme soumise. Elle se courbait sous l’autorité jalouse de mon père et de sa communauté parce qu ’elle était turque. Je ne voulais pas de la pression de ces gens aux coutumes figées et liberticides qu’elle ne pouvait pas simplement ignorer. Je me rêvais forte et indépendante. Je ne pouvais donc pas parler la même langue qu’elle.
Jusqu’à l’obtention de mon bac, j’ai donc systématiquement répondu en français à mes parents qui me parlaient en turc.
Puis j’ai quitté le domicile familial et la petite ville étriquée où nous habitions pour venir faire mes études à Paris. J’ai, je crois, un peu affiné mes analyses sociologiques, mes amalgames et mes parce que, lu Abdelmalek Sayad, un peu mieux compris ma mère, et.... je me suis inscrite aux Langues’ O en turcologie parallèlement à mes études d’histoire ou plus précisément de relations internationales.
A cette même époque j’ai aussi vécu la plus douloureuse de mes contradictions linguistiques avec un jeune homme dont j’étais tombée éperdument amoureuse.
Lui avait une mère arménienne et voulait voir en moi une héroïne directement sortie des contes de Yasar Kemal, droite, douce et fière et utilisant ce turc souple et polysémique des montagnes de l’Ararat au pied duquel je suis née. Un turc dans lequel il est beaucoup question d’honneur.
Moi je lui étais reconnaissante de me faire découvrir les phrases tordues et en miroir de Bourdieu. Il me parlait un turc que je trouvais bizarre et qu’il avait appris dans la rue tandis que je me forçais à parler avec lui un français que je voulais impertinent et coquin.
Autant dire que l’échec fut cuisant…. et paradoxalement me réconcilia avec le turc.

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Commentaires
A
Canalblog a bu ce soir...
A
Bloguette, tu n'as pas dit que je donnais une image négative de ma mère, et je ne t'ai jamais lu maladroite ! C'est moi qui me pose la question... aussi grâce à ta question. Je vais dire une grosse généralité, mais je crois qu'on a toutes des rapports très complexes avec nos mères (et les pères je n'en parle même pas..) ce n'est pas Doc-Doc qui nous contredira je crois ! <br /> <br /> Doc-Doc: trois semaines effectivement, il ya probablement des phrases qui vont se débloquer ! C'est drôlement attendrissant à observer je trouve !
A
Bloguette, tu n'as pas dit que je donnais une image négative de ma mère, et je ne t'ai jamais lu maladroite ! C'est moi qui me pose la question... aussi grâce à ta question. Je vais dire une grosse généralité, mais je crois qu'on a toutes des rapports très complexes avec nos mères (et les pères je n'en parle même pas..) ce n'est pas Doc-Doc qui nous contredira je crois ! <br /> <br /> Doc-Doc: trois semaines effectivement, il ya probablement des phrases qui vont se débloquer ! C'est drôlement attendrissant à observer je trouve !
D
Anissa, pardon
D
Aniss a 5 ans et demi comprend tout ce qu'il lui dit et parme quelues mots. peut-être cela va-t-il se débloquer cet été car il l'emmène 3 semaines au Maroc. A suivre, donc :o)
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